7 mars 2011

Les neuf vies du chat

Bienvenue en Indonésie. 10 jours illustrés et contés dans l’extrême ouest du pays. Je retrouve enfin cette passion quelque peu perdue en Malaisie et à Singapour. Cette rage d’exploration qui me possédait les 3 premiers mois de mon voyage fait sa réapparition. Au menu : vol, histoire d’amour, lac, volcan, enquête, sources chaudes, jungle, plages et photos. Bonne lecture.

Il ne reste que 10 jours avant que mes 2 frères arrivent à Jakarta emportant avec eux mon cher et tendre appareil photo qui reviendra réparé. Ca tombe bien car le mien me joue de sales tours et mes photos s’en sentent affectées.

Bien décidé à explorer intensément ce pays aux treize milles îles, je commence mes pérégrinations à Sumatra, l’extrême ouest de l’Indonésie. Medan, son chef-lieu, ancienne colonie hollandaise et ultra islamique, est une métropole bruyante et polluée. Je m’installe dans un hôtel ressemblant à un repère à malfaiteurs, juste en face de la plus grande mosquée de la ville hurlant 5 fois par jours ses chants de prière assourdissants. Mais pourquoi ne peuvent-ils pas prier en silence ? Surtout à 5 heures du matin !!! Je fais la rencontre de Roy. Il parle un anglais quasi parfait et, bien qu’ayant directement compris son stratagème pour soutirer de l’argent aux touristes de passage, sa principale source de revenus, nous nous lierons d’une amitié sincère. Il me fera découvrir sa vision du monde et m’inculquera les rudiments nécessaires au voyage à travers son pays. Décidément, j’aime vraiment rencontrer des locaux. C’est tellement plus enrichissant. 2 journées et 2 soirées à visiter, grignoter, boire, bavarder, échanger, rire, philosopher, refaire le monde, écouter de la musique, savourer les silences et, parfois, ne rien faire. Je me dis que fainéanter dans un monde neuf est la plus absorbante des occupations.

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Grâce au planning ingénieux que Roy me dessina, je débute mon parcours intrépide par la visite du Lac Toba. En trajet, je me rends compte que mon téléphone a disparu. Fouillant ma mémoire à court terme, j’en conclu que quelqu’un s’est immiscé dans ma chambre à Medan pour me le dérober. Je préviendrai Roy plus tard.

Le lac Toba. Cette étendue d’eau est aussi grande que le Luxembourg et poinçonne en son centre l’île de Samosir. Juste avant de m’installer dans une guest house au bord de l’eau reflétant telle un miroir la splendeur du silence, je rencontre sur le bateau Hotnida. Elle aura trente quatre ans demain et puisqu’elle ne sait que faire de ses jours de congé, elle me propose d’être mon guide personnel, sans rémunération aucune. Pour une fois que quelque chose est gratuit, me dis-je, je n’allais pas refuser. D’autant plus que le courant passait bien. Nous décidons de nous rencontrer le matin suivant, jour de son anniversaire, pour sillonner la contrée. D’ici là, exténué par les longues heures de trajets, je me réjouissais de ce moment de solitude à venir pour palper du haut de mon pilotis la douceur de l’air et observer la luminosité s’atténuer timidement. Vint alors un groupe de 20 chinois venus célébrer leur nouvel an à coup de hurlements et cris non humains à quelques mètres de mon mirador. En l’espace d’une seule nuit, j’appris à détester la Chine entière et leur langue stridente. À 6 heures du matin, n’ayant pas fermé les yeux de la nuit, je sortais de ma tanière pour découvrir gisant et totalement souls quelques énergumènes tentant désespérément de pousser la chansonnette alignant un flot de fausses notes à la guitare. J’eu envie de leur cracher dessus. Cette pensée fut directement éradiquée dès que j’aperçu la splendeur du soleil levant s’offrant en spectacle pour m’annoncer que cette journée allait être de toute beauté. Ainsi soit-il.

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Bon anniversaire Hotnida ! Tu me rejoins et, cerise sur le gâteau, tu me proposes de conduire ton scooter. En Indonésie, c’est toujours l’homme qui dirige le carrosse m’annonça t’elle. Armé de ma machine à figer le temps, je m’arrête sans cesse pour voler des paysages, des architectures et des scènes de vie tout droit sortis d’un roman de fiction qui vous tient constamment en haleine. Nous allons nous baigner dans des sources chaudes aux émanations de souffre étrangement ressemblantes à l’odeur d’œufs pourris et entamons notre retour après un avoir savouré (et le mot est faible) le meilleur jus de fruit de la passion de toute ma vie.

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Hotnida, qui ne maitrise pas réellement la langue de Shakespeare, m’annonça au crépuscule : "Me love you Nico. Me want go in you country with you". Le choc fut brutal et la bulle magique dans laquelle j’évoluais depuis l’apparition à l’aube de Matahari (le soleil en indonésien) éclata violemment. J’étais dans de beaux draps et maintenant il fallait trouver un stratagème pour m’en sortir. Je réalisai que j’avais été aveugle à tous ses signes qu’elle m’envoyait depuis le début de la journée, surement dû au manque de sommeil. Je tentais de la résonner à force de lui répéter que mon cœur n’était qu’un rock qui avait oublié depuis des années ce que signifie aimer. Et à elle de répondre en essayant de m’embrasser : "Open little bit you heart for me please, please, pleeeeaaaase." Elle insistait encore et encore faisant mine de pleurer et tentant toujours de m’embrasser. Je décidai de changer de technique et jouer la carte de la colère. Cette dernière fut un triomphe. Sur un air sérieux, je lui disais que si elle continuait je partirai sur le champ et qu’elle n’entendrait plus jamais parler de moi, insistant pour que ce sujet de conversation soit clos à jamais. Acceptant à contre cœur, elle insista quand même pour me mener le lendemain à mon minivan. Des torrents de larmes s’écoulaient de ses yeux lors de nos adieux. Dans la voiture vers ma prochaine étape, je me sentais trituré entre soulagement et remord.

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Ce trajet, où chaque dépassement et chaque virage était un trompe la mort, me mena à Berastagi, lieu de trekking pour grimper le volcan Sibayak. Je fixe un rendez-vous à 8h le lendemain matin pour débuter l’ascension et je profite de l’après midi pour jouer moi aussi au voleur, mais au voleur d’images. Balade, photos, internet, drache nationale, nasi goreng (plat traditionnel) et poulet saté. Un délice.

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Je n’ai plus de téléphone donc je n’ai plus de réveil. Je me fais réveiller pas la réceptionniste qui me dit qu’on m’attend depuis 30 minutes déjà. Mon guide, Giring, 35 ans, tout petit, me mène jusqu’au sommet du volcan à travers la jungle dans son état le plus sauvage. Des macaques, des aigles, des lézards nous adressent leur bienvenue dans leur univers. Giring m’enseigne les vertus médicinales de certaines plantes locales, il m’indique comment trouver de l’eau dans d’autres et où trouver de la nourriture. C’est un homme de la jungle, un vrai, brandissant sa machette pour dégager le chemin perpétuellement recouvert de végétation. L’odeur de souffre nous informait de notre arrivée imminente. Au sommet, des colonnes de fumée s’extirpant des entrailles de la terre produisaient un son semblable à du gaz s’échappant d’une bouteille à air comprimé. Mon guide m’indiqua que certains locaux, campant dans la région, y viennent cuire leurs aliments emballés en quelques dizaines de secondes. Ce nouveau spectacle de la nature se déroulait sans prétention sous mes yeux. J’aurais pu rester des heures à contempler cette beauté, me sentant le roi du monde, mais il fallait descendre par un autre chemin pour aller se baigner dans les sources chaudes. Après l’effort, le réconfort.

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En fin de journée, je décide de prendre le bus public pour revenir sur Medan, y rester une nuit et prendre mon avion vers l’île de Pulo Weh (= l’île "W") pour sa forme caractéristique. Mais d’abord, il fallait que je confronte Roy à la disparition soudaine de mon téléphone. J’ai directement lu dans ses yeux qu’il n’était pas l’auteur de ce larcin et il entreprit d’investiguer sur cette affaire avec son meilleur ami, Kuco.

Entre-temps, une autre surprise m’attendait à l’hôtel. Hotnida avait fait tout le chemin en mobilette depuis le lac Toba (+/- 5h) pour m’annoncer en pleurant qu’elle avait perdu mon adresse email noté sur un papier. Vous n’imaginez pas la tête que j’ai faite. Mon sentiment de remord s’est transformé définitivement en colère lui ordonnant de me laisser en paix car elle agissait en psychopathe. Je lui écrivais encore une fois mon email et, tout en lui disant que je n’étais pas content, elle m’informa qu’elle avait pris une chambre dans le même hôtel que moi. Néanmoins, je la priais poliment de passer la soirée de son côté en me laissant vaquer à mes occupations. Elle n’eut pas d’autres choix que d’accepter, mais elle se jeta une dernière fois sur moi pour me serrer dans ses bras de toutes ses forces en pleurant à chaudes larmes comprenant que ce moment était bien le dernier.

Le lendemain, en me conduisant à l’aéroport, Roy m’annonça qu’il avait une plus ou moins bonne nouvelle. Enquêtant et remuant ciel et terre la veille pour m’aider, Kuco et lui entendirent parler d’une personne revendant un Samsung noir à clapet acheté précédemment à quelqu’un d’autre, le dit voleur. Kuco alla sur place mais le vendeur n’était point là. Son colocataire lui annonça qu’il était parti avec le téléphone, mais il avait laissé la carte Sim sur la table. Il la récupéra et cet ainsi que je pu garder mon numéro de téléphone. Malheureusement, tous mes contacts se trouvent dans la mémoire interne du gsm. Par la suite, Roy m’informa par email que le vendeur désirait l’équivalent de 60 euros pour le rachat du téléphone, et à cela devait bien sur s’ajouter les frais d’envoi. Je décidais de laisser tomber. À ce moment, j’écrivais dans mon carnet de route en grand : "LIFE IS AN ADVENTURE !"

Aéroport, arrivé à Bandah Aceh, la pointe nord de Sumatra. Taxi jusqu’au ferry et traversée de 2 heures pour atteindre l’île "W".

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Sur le bateau, je rencontre 2 anversois, Aurélie et Olivier, parfaitement bilingues qui parlent français entre eux. Elle a terminé ses études de psycho et lui est event manager au Knokke Out à la mer du nord. Sympathisant directement, nous décidons de parcourir un bout de chemin ensemble. Le premier jour, nous nous rendons chez Freddy, une guest house tenue par un sud africain. Très luxueux dans un cadre paradisiaque, mais cher aussi.

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Le lendemain, nous allons de l’autre côté de l’île profiter des joies du snorkling. Je fais pas mal de rencontres, dont Jeff, un québécois qui voyage seul lui aussi et passons nos soirées à discuter de tout et de rien autour d’un jeu de carte. Les jours s’écoulent sans même que j’ai le temps de m’en rendre compte.

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Il est temps d’aller rejoindre mes amis, Jean-Mi et Dav, à Jakarta. Mon avion aura finalement 5 heures de retard avant de fermé les yeux, épuisé, mais heureux.

Mon aventure solitaire prend fin tout doucement. Je vais avec le sourire et toute ma rage de vivre à la rencontre de mes 2 frères. 2 camarades pendant 3 semaines et un compagnon de voyage pendant 2 mois et demi, voilà ma prochaine destinée.

Souvent je pensais aux neuf vies proverbiales du chat ; pour ma part, j’ai l’impression d’entrer dans la deuxième.

À la question du motif de mon voyage, je répondrai qu’un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.

À suivre…

 

MON TRAJET À SUMATRA

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8 commentaires:

  1. Bravo pour tes photos et ton récit, j'ai bien aimé l'histoire d'Hotnida! A Bruxelles les choses ne changent toujours pas. Pour l'instant, on est en pleines vacances de carnaval et il y a plein de soleil sur la ville.
    A bientôt.

    Seul le voyage importe et non la destination.

    Maxim VdB

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  2. ...Merci merci je viens de m'échapper quelques instants ...

    D'aventures en aventures, je me suis mise à rêvasser, à coudée à mon desk, un crayon ordinaire à la bouche...bon je vais me chercher un café !

    Enjoy mister Usu!.

    Ps: Tes photos sont top!
    Kiss

    Sunny parker

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  3. Tu nous fais vraiment RÊVER! je finis ma lecture avec la chair de poule, et je trouve que tu es de plus en plus imprégné dans ton voyage, tu as l'air de t'épanouir de chaque détails qui t'entoure.. Comme je t'envie nondidju
    MERCI Nishko! je suis si fière de toi:-)
    ps: vivement le prochain numéro

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  4. Me love you Poulos ;-)

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  5. Joli récit et bien écris !
    Max Koh Tao

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  6. LIKE LIKE and SURLIKE Toine

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  7. Comme si les images parlent, vraiment très réussi !!

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